Les „Scènes d'enfants“, Op. 15, sont le fruit d'une décennie merveilleusement fertile de la vie de Schumann. Avec ce cycle composé en 1838, il créa un nouveau genre, en faisant entrer l'enfant et l'enfance dans l'histoire de la musique. Les pièces de ce cycle n'ont toutefois pas de but pédagogique et ne parlent pas le langage des enfants, mais expriment plutôt la nostalgie romantique des adultes pour leur jeunesse. Il se compose de treize miniatures magistrales qui forment un tout cohérent. La plupart d'entre elles sont courtes et de structure très simple (la majorité se compose de deux ou trois parties avec un motif récurrent). Schumann remplit cette forme modeste d'une musique pure, belle et poétique, dépourvue de fioritures.
Chaque pièce dépeint de manière extrêmement expressive les états d'âme, les personnages caractéristiques ou d'autres éléments annoncés dans le titre. Schumann exprime le “programme“ de ces petites pièces d'une manière extrêmement délicate et sensible grâce à un rythme varié, mais cohérent au sein d'un genre, à une mélodie expressive et à des harmonies finement épicées. Il assure l'unité du cycle en enchaînant des pièces contrastées dans leur atmosphère et leur caractère - rêveuses, gaies, tristes, heureuses, agitées, chaleureuses, enjouées et doucement ironiques - créant ainsi un petit monde singulier. Enfin, le poète lui-même prend la parole et fait ses adieux après les morceaux fortement rythmés dans une forme libre plus courte, dans laquelle Schumann intégra également un minuscule récitatif instrumental.
Quelques précisions sur la genèse de cette oeuvre, traduit des notes de „S.J.S.“ publiées au verso de la pochette du disque Vanguard VRS 415 (dont provient l'interprétation proposée sur cette page):
«« Le 17 mars 1838, Robert Schumann écrivait dans une lettre à sa fiancée, Clara Wieck: „ ... J'ai découvert que le suspense et les rebondissements sont les meilleurs stimulants pour l'imagination. J'en ai eu ma part ces derniers jours, alors que j'attendais ta lettre et que j'écrivais des volumes entiers de compositions merveilleuses, folles et gaies qui te feront ouvrir les yeux quand tu les joueras. En effet, j'ai parfois l'impression que je devrais hurler avec la musique. Avant que je n'oublie, laisse-moi te dire ce que j'ai écrit. Que ce soit en réponse à quelques mots que tu m'as écrits un jour, disant que je te faisais parfois l'effet d'un enfant, je me suis envolé et je me suis amusé à composer trente petites pièces drôles, dont j'ai sélectionné douze que j'ai baptisées «Kinderszenen». Vous les aimerez, mais vous devrez oublier que vous êtes un virtuose pour l'instant. Elles portent des titres tels que „Croquemitaine“, „Au coin du feu“, „Colin-maillard“, „Enfant suppliant“, „Cavalier sur le cheval de bois“, „Gens et pays étrangers“, „Curieuse histoire“, etc. Elles sont assez descriptives, vous voyez, et faciles comme bonjour ... “.
Dans une autre lettre datée du 5 septembre 1839 à son ami et mentor H. Dorn, Schumann, commentant l'une des premières critiques défavorables des «Kinderszenen», nous donne un aperçu inestimable de son approche de ces vignettes intimes. „ J'ai rarement rencontré quelque chose d'aussi maladroit et banal que la critique de Rellstab sur mes «Kinderszenen». Il semble penser que j'évoque dans mon imagination un enfant en larmes et que j'y adapte les notes. C'est exactement le contraire, mais je ne nierai pas qu'une vision d'enfants m'a hanté pendant que j'écrivais. Les titres ont bien sûr été ajoutés après coup et ne sont en réalité que de minuscules repères pour l'interprétation et la conception ... “
Il est donc clair que Schumann ne destinait pas ces pièces aux enfants, mais qu'il voulait plutôt parler des enfants. Ce sont des souvenirs poétiques de l'enfance vus avec le recul de la maturité. Le verdict de la postérité a renversé le jugement malavisé des „Rellstabs“ auxquels Schumann avait affaire. Les «Kinderszenen» sont généralement reconnues comme des chefs-d'oeuvre miniatures dans lesquels la forme et le contenu atteignent un équilibre parfait. »».
Les „Scènes d'enfants“, Op. 15, de Robert SCHUMANN sont ici interprétées par Jacqueline BLANCARD. Elle les enregistra pour le label Vanguard en 1950, elles furent publiées sur le recto de ce disque Vanguard VRS 415:
01. «Von fremden Ländern und Menschen»
Gens et pays étrangers 01:59 (-> 01:59)
02. «Kuriose Geschichte», Curieuse histoire 01:05 (-> 03:04)
03. «Hasche-Mann», Colin-maillard 00:36 (-> 03:40)
04. «Bittendes Kind», L'enfant suppliant 01:02 (-> 04:42)
05. «Glückes genug», Bonheur parfait 01:14 (-> 05:56)
06. «Wichtige Begebenheit», Un événement important 01:02 (-> 06:58)
07. «Träumerei», Rêverie 02:34 (-> 09:32)
08. «Am Kamin», Au coin du feu 00:58 (-> 10:30)
09. «Ritter vom Steckenpferd», Cavalier
sur le cheval de bois 00:42 (-> 11:12)
10. «Fast zu ernst», Presque trop sérieusement 01:55 (-> 13:07)
11. «Fürchtenmachen», Croquemitaine 01:33 (-> 14:40)
12. «Kind im Einschlummern», L'enfant s'endort 02:26 (-> 17:06)
13. «Der Dichter spricht», Le poète parle 02:25 (-> 19:31)